Quel est le type d'immigrant ayant le plus de chance de réussir au Canada
Par Lefabson Sully
Une réflexion sociologique de type analytico-comparative entre les typologies structurales et les réseaux personnels basant sur l'expérience des immigrants au Canada, suivi de recommandations pratiques de l'auteur.
De nos jours, les dynamiques relationnelles sont de plus en plus des objets d’études car avec la modernité, l’individu devient un « acteur de sa vie sociale et un acteur de sa vie professionnelle ». (Bidart 2011, p1) Au Canada, la proportion d’immigrants tend à augmenter tandis que leur insertion sociale ainsi que leur réussite économique font partie des enjeux préoccupants.
Quels sont les facteurs en lien avec le réseau personnel des immigrants qui pourraient faciliter les immigrants à réussir économiquement? Dans cette réflexion, je vais vous présenter succinctement la typologie structurale des réseaux sociaux de Bidart et al., ensuite je vais passer en revue certains aspects de la réussite des immigrants au regard de l’article intitulé réseaux personnels et adaptation des immigrants sur le plan économique.
La typologie structurale des réseaux selon Bidart et al.
Le réseau social personnel d’un individu est constitué d’un système de relations sociales. Ce n’est pas la somme de certaines relations informelles, cependant il contient une structure qui varie selon sa taille, sa composition et son niveau de diversité. La typologie structurale est une grille de classification qui représente les réseaux personnels en quatre grands types ainsi que leurs caractéristiques à savoir le type dense, le type centré, le type dissocié et le type composite.
Comme son nom l’indique, le réseau de type dense est connu par le niveau élevé de sa densité qui est distribuée sur l’ensemble du réseau (entre chaque Alter). Dans un réseau de type dense, la réalité est comme tout le monde se connait. On retrouve ce type dans les relations basées sur la famille et des amis proches. En effet, il y a beaucoup de connexions par rapport au nombre d’Alter et c’est un réseau concentré.
Si les réseaux denses ont une forte densité, les réseaux de type centré ont une forte prévalence de l’intermédiarité.
Dans ce type de réseau, la centralité d’un Alter a une place importante dans l’association des différentes parties du réseau. Pour les réseaux de type dissocié, il existe un nombre d’Alter élevé avec très peu de connexion. L’individu (l’égo) qui favorise ce genre de réseau fait en sorte que famille et ami ne se mélange pas. Il n’y a presque pas d’histoire ou de rapport commun entre les différents membres de ces réseaux qui ont beaucoup d’isolés. Cette dissociation dans ces réseaux peut être l’effet de la distance géographique ou des différences de strates de vies.
Enfin les réseaux de type composite sont les plus complexes dans leurs caractéristiques. Ils ont une densité basse, beaucoup d’isolés et la centralité est inégalement répartie entre les Alter.
Réussite des immigrants au Canada en lien avec leurs réseaux
Dans son article intitulé réseaux personnels et adaptation des immigrants sur le plan économique, Thomas Derrick aborde certains enjeux auxquels sont confrontés les immigrants dans leur processus d’intégration. Selon lui, le capital humain de celui qui vient d’immigrer compte beaucoup, cependant, son capital social est aussi un facteur déterminant dans sa réussite économique.
On appelle capital social le réseau personnel de l’individu, soit l’ensemble de gens de sa famille, de ses amis avec qui ils entretien des relations et sur qui il peut aussi compter. Il est évident dans son article et selon les résultats de l’enquête que les réseaux personnels jouent un rôle essentiel dans l’intégration économique des nouveaux immigrants. Cela ouvre la voie à de meilleurs emplois et à de meilleures rémunérations.
Alors qu’il met beaucoup d’accents sur l’existence des réseaux, il en met beaucoup plus sur le type de réseau qui pourrait faciliter cette réussite. Selon lui il va falloir que le réseau soit diversifié et étendu pour qu’il mène à de meilleures conditions de travail pour un immigrant de moins de 10 ans.
Enfin, au regard de Derrick, nous pouvons dire qu’il existe un lien fort entre l’adaptation économique et l’adaptation sociale des immigrants. Nous pouvons affirmer que même si les réseaux diversifiés n’expliquent que partiellement leur faible niveau de revenu; il est judicieux de dire que plus le réseau social des nouveaux arrivants est diversifié, plus il pourra jouir de bonnes conditions économiques.
Alors, en lien avec l’analyse des réseaux de Bidart et al. qui met aussi beaucoup d’accents sur la diversité et la solidité des réseaux, nous pouvons dire que l’article rejoint Bidart et al à certains points Cependant, il n’y a pas vraiment de relation étroite entre l’un ou l’autre parmi les 4 types de réseau (dense, dissocié, centralisé ou composite) et la réussite économique des immigrants expliquée par Bidart. Car cette réussite, nous le rappelons serait plus liée à la diversité du réseau personnel de ces dits immigrants.
Je termine vraiment avec ces recommandations selon moi qui sont essentielles pour une bonne intégration.
Les immigrants doivent diversifier leurs réseaux sociaux pour plusieurs raisons dont:
Intégration culturelle : En diversifiant leurs réseaux sociaux, les immigrants ont l'opportunité de rencontrer et d'interagir avec des personnes de différentes cultures et origines. Cela favorise une meilleure compréhension et appréciation des différentes traditions, perspectives et modes de vie, ce qui contribue à une intégration culturelle plus harmonieuse dans leur nouveau pays.
Apprentissage linguistique : Interagir avec des personnes dont la langue maternelle est différente peut aider les immigrants à améliorer leurs compétences linguistiques dans la langue locale. Ils sont exposés à des conversations authentiques et à différentes expressions linguistiques, ce qui facilite l'apprentissage de la langue et l'adaptation à la nouvelle société.
Accès à des opportunités professionnelles : En diversifiant leurs réseaux sociaux, les immigrants peuvent élargir leurs perspectives professionnelles. Ils peuvent entrer en contact avec des personnes qui peuvent leur fournir des informations sur le marché du travail, des conseils pour la recherche d'emploi, des opportunités de formation ou même des recommandations pour des postes vacants. Les relations professionnelles peuvent jouer un rôle crucial dans l'avancement de carrière des immigrants.
Soutien social : Les réseaux sociaux diversifiés offrent aux immigrants un soutien social crucial. Ils peuvent rencontrer d'autres personnes qui ont vécu des expériences similaires d'immigration et devenir une source de soutien mutuel. Ils peuvent partager des conseils, des défis, des ressources et des expériences, ce qui peut aider à atténuer les sentiments d'isolement et de frustration souvent associés à l'immigration.
Élargissement des horizons : Diversifier les réseaux sociaux permet aux immigrants de sortir de leur zone de confort et de découvrir de nouvelles idées, perspectives et opportunités. Ils peuvent être exposés à de nouvelles activités, à des événements culturels, à des hobbies, à des causes sociales, ce qui enrichit leur vie et élargit leurs horizons personnels.
Par ailleurs, vu que la plupart des immigrants arrivent sans leur famille, pouvons-nous affirmer qu’ils auront plus de risque de désaffiliation avant leur dixième année et ils sont plus enclins à avoir des réseaux dissociés. Il est important de noter que diversifier les réseaux sociaux ne signifie pas abandonner les liens avec sa propre communauté ou négliger les relations familiales et amicales existantes. Au contraire, cela implique de chercher activement des occasions de rencontre et d'interaction avec des personnes issues de divers horizons culturels, ethniques et sociaux, tout en maintenant des liens forts avec ses propres origines.
Si vous chercher à développer plus de réflexions sur les enjeux liés aux réseaux sociaux des immigrants ou vous chercher des ressources ou des conférenciers dans ce domaine, vous pouvez m'écrire:
lefabson.sully@umontreal.ca
Lefabson Sully, Étudiant
Département de sociologie de l'Université de Montréal
Bibliographie
Bidart, C., Degenne, A., & Grossetti, M. (2011). La vie en réseau : dynamique des relations sociales. Presses universitaires de France.
Derrick, T. Réseaux personnels et adaptation des immigrants sur le plan économique, Tendances sociales canadiennes, No 11-008, 2011, P 57 – 69.